On surnomme ces hommes les “Zama Zama” dans le pays, ce qui signifie “ceux qui tentent leur chance” en Zoulou, et ils peuvent rester des jours dans des galeries, pour tenter d’extraire des restes de minerais au sein d’anciens sites. Désormais, la police tente de les forcer à remonter des puits en les affamant et les assoiffant, afin de les arrêter.
Cette affaire a fait beaucoup de bruit, à cause de son ampleur et des méthodes pour le moins “musclées” de la police. Mais ce n’est pas un cas isolé, et le pays voit très régulièrement des mines être exploitées illégalement.
Oui, et ce sont souvent des mines abandonnées, qui ne sont plus rentables, car les minerais restants à extraire ne sont pas assez concentrés, ou se trouvent trop en profondeur. Dans le cas de Stilfontein, il s’agit d’or, mais les Zama Zama peuvent aussi jeter leur dévolu sur d’anciennes mines de charbon, ou de fer.
Elles sont facilement accessibles, car à l’époque, les lois étaient plus souples pour les exploitants, qui ne s’embarrassaient pas forcément de plan de fermeture, une fois l’extraction terminée. De plus, il existe des façons de contourner ces lois sur l’après-mine, et d’échapper aux contrôles.
Résultat, les lieux sont désertés, sans être restaurés et réhabilités comme cette mine, au niveau de Stilfontein, fermée depuis 2013 : ses différents puits ont simplement été scellés.
On estime que le pays compte environ 6 000 mines abandonnées. Et les minerais qu’elles contiennent encore attirent ensuite les communautés alentour, composées d’anciens travailleurs des mines, et les migrants de pays voisins, en quête d’une activité pour sortir de la pauvreté et du chômage de masse. Des familles entières vivent parfois de leur travail sous terre. Le tout chapeauté par des gangs, qui gèrent et supervisent l’activité.
L’augmentation du cours de l’or, ces dernières années, rend, de plus, le métal jaune très attractif. Mais une fois qu’il est sorti du sol, comment rejoint-il le marché légal ?
Les autorités du pays distinguent 5 niveaux d’acteurs : les mineurs clandestins ne sont qu’au tout début de la chaîne, ce sont ceux qui gagnent le moins grâce à ce trafic. Bien souvent, ce sont ensuite, au niveau supérieur, les gangs qui les supervisent qui vendent cet or. Pour l’écouler, ils se tournent vers un troisième niveau, des entités -notamment des ferrailleurs et des bijoutiers – qui ont des permis pour le fondre et le mélanger. C’est ainsi que le métal précieux passe d’illégal à légal, et plus il est transformé, plus il est difficile de le tracer. Parfois, il peut aussi passer en fraude dans les pays voisins, comme au Zimbabwe, pour être mélangé.
Le quatrième niveau est celui des compagnies qui exportent à l’international, et le 5ème, celui des acheteurs internationaux. L’une des destinations de choix pour cet or, ce sont notamment les Emirats Arabes Unis.
Et tout ce système représente des pertes importantes pour le gouvernement sud-africain, puisqu’il ne perçoit ni taxes, ni royalties sur cette exploitation illégale. Le ministère des mines estime que ce trafic coûte au pays 3,5 milliards d’euros par an.
Il y a désormais une tentative de légalisation, avec un texte en cours de préparation pour que les mineurs artisanaux puissent exercer dans le cadre de la loi ?
Oui mais il y a peu de chance que cela règle vraiment le problème, car cette loi vise plutôt ceux qui font petite activité en surface, et le texte comporte encore des zones floues, qui mériteraient d’être davantage définies. Enfin, alors que le pays est travaillé par des tensions xénophobes, les permis qui seraient délivrés pour des activités minières artisanales, seraient réservés aux Sud-Africains : or nombre de mineurs clandestins viennent d’autres pays d’Afrique australe.
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