Aujourd’hui le Black Friday… une journée de promotions venue des Etats-Unis qui prend chaque année un peu plus d’ampleur. peut-on y faire de véritables affaires ? Doit-on s’en méfier ? Marc Filzer, économiste et fondateur du Centre de Recherche en Marketing de Bourgogne répondait à nos questions, ce vendredi 29 novembre, sur France Bleu Auxerre.
France Bleu Auxerre : Doit-on, en tant que consommateur, se méfier de ce Black Friday ?
Marc Filser : “Il faut toujours se méfier de toutes les promotions. La France est un pays dans lequel les distributeurs, historiquement, ont recourt aux opérations promotionnelles toute l’année, de manière à maintenir leur position concurrentielle face aux autres enseignes. De ce fait, les opérations promotionnelles sont quasiment permanentes et le Black Friday n’est qu’une forme particulière d’opérations promotionnelles. C’est une réduction temporaire du prix. Donc ce qui est important, c’est de voir quel était le prix habituel du produit et quelle est l’ampleur réelle de la promotion qui est proposée”.
On a l’impression que ces mieux que les soldes, c’est une réalité ?
Marc Filser : “La différence par rapport aux soldes est majeure. Les soldes sont réglementés par la loi et pendant la période des soldes, un distributeur a la possibilité de vendre à perte, c’est-à-dire en dessous de son prix d’achat. Au contraire, pendant une opération promotionnelle, comme le Black Friday, la vente à perte est interdite, donc le distributeur ne peut en aucun cas proposer un prix de vente inférieur à son prix d’achat.
Pourtant, certaines enseignes promettent des réductions de 50, 60,voire 70%… Ça peut révéler une pratique commerciale trompeuse ?
**Marc Filser : “Le taux de marge du distributeur est différent et il peut très bien arriver que sur certains articles, sur certains produits d’appel, le distributeur décide de faire une marge zéro Donc ils ne pratiquent aucune marge et ils vendent au prix d’achat”.
Comment peut-on expliquer que cette opération “Black Friday”, qui n’est pas un concept nouveau, qui a été importé des Etats, prenne autant d’ampleur chez nous ?
Marc Filser : “Alors, il a été importé des États-Unis, il faut le rappeler, essentiellement par les opérateurs d’Internet. On se situe vers les années 2010, Internet commence à devenir un canal de distribution important, et pour conforter leur position sur le marché, les plateformes vont importer en Europe la pratique du Black Friday qui existe aux Etats-Unis depuis à peu près 1960.
Deux, trois années après, vers 2014, les distributeurs physiques, les grandes enseignes de magasins, s’aperçoivent que cette opération promotionnelle initiée par les commerçants en ligne, a remporté un grand succès. Et les magasins physiques décident d’embrayer derrière les commerçants en ligne et engagent cette opération à leur tour, de manière à conserver leur position face aux ventes en ligne qui se développent très rapidement à cette époque”.
On dit souvent que c’est intéressant surtout pour les grandes enseignes ce Black Friday. Mais est-ce que des petites boutiques à Auxerre, à Sens, à Avallon ou dans d’autres petites villes, peuvent s’y retrouver ? Est-ce qu’elles doivent s’aligner ?
Marc Filser : “Je pense que ce n’est absolument pas obligatoire. Tout dépend de la catégorie de produits que vous proposez. Lorsque vous regardez la structure des ventes qui sont réalisées pendant le Black Friday, il y a des catégories de produits qui sont vraiment directement concernées par ces opérations. L’électroménager, l’électronique, les loisirs, les articles de sport, etc.
Donc si vous êtes un commerçant indépendant et que vous proposez des produits dans ces catégories, je pense qu’il est effectivement important de rester compétitif par rapport à votre concurrence et donc de vous aligner dans la mesure du possible, bien sûr, sur les pratiques de vos concurrents dans votre zone de chalandise.
En revanche, si vous vendez des produits qui sont assez peu impactés par le Black Friday, vous pouvez peut-être réaliser une opération promotionnelle pour créer un peu de trafic dans votre point de vente, mais à mon avis, l’impact sur votre chiffre d’affaires sera assez limité”.
Comment ne pas se faire avoir sur les prix pendant cette opération du Black Friday ?
Marc Filser : “D’abord, il faut faire des comparaisons. Commencez par faire des comparaisons bien avant le lancement de l’opération. Sur les prix qui sont pratiqués pour les produits que vous avez envie d’acheter. Et pendant le Black Friday lui-même, comparer les prix dans les différentes enseignes. Et puis il faut se fier aux sites qui ont pignon sur rue, si j’ose dire, ou pignon sur net, c’est-à-dire les plateformes de vente en ligne qui ont la plus forte visibilité. Il faut se méfier de plateformes qui sont plus anecdotiques, qui sont moins connues, qui peuvent éventuellement avoir des pratiques un petit peu plus douteuses”.