Pour lui, “c’est une manière parmi d’autres” d’agir pour réclamer la libération de Boualem Sansal. “Il y a eu des pétitions, il y a eu des appels, mais tout ça, c’est assez fugace. Au bout d’un moment, on les oublie, ces pétitions. Vous avez vu que les prix Nobel se sont mobilisés, comme beaucoup de gens. Moi, ma crainte, c’était que tout ça soit un feu de paille et qu’il reste dans sa geôle ou dans son hôpital, puisqu’il est hospitalisé, sans que plus personne ne s’en occupe. Donc il y avait l’idée qu’une institution très ancienne de la République, une institution culturelle justement, pas politique, puisse le soutenir.” Une initiative qui n’a rien donné : “c’est une institution qui aurait pu, je pense, jouer un rôle, mais qui a préféré, au cours d’un débat qui était d’ailleurs assez animé et très respectable, rester en retrait. Je le regrette, mais on trouvera d’autres moyens de ne pas l’oublier.”
“Je le connais très bien, et l’idée c’était de lui dire : tu n’es pas seul, on est avec toi, on est autour de toi”, explique Jean-Christophe Rufin. Au sein de l’Académie, assure-t-il, “il y a eu une reconnaissance générale du fait qu’il fallait le soutenir. Mais après, la question, c’est les moyens. Certains ont pensé, ont dit, avec prudence, attention de ne pas aggraver les choses. Parce que finalement, plus la France le soutient à travers des institutions comme ça, plus, peut-être, les charges s’accumuleraient contre lui. Moi je n’y crois pas, mais c’est entendable.”
L’académicien se dit toutefois “très inquiet”. “Il est dans une situation personnelle très difficile, sa femme est en France dans un hôpital où elle a une maladie assez grave, et ils sont séparés par sa détention. Ça n’est pas un combattant, même si c’est quelqu’un d’assez solide au fond. Il a toujours refusé les protections. Il y a un côté chez lui, presque Gandhi, si vous voulez : c’est un non-violent. Alors, j’espère que ça lui donnera la force de résister, mais enfin, il a l’âge qu’il a, et pour ceux qui l’ont vu, il a pris cinq ans en 15 jours.”
